Les maires du département ont pu assister à une réunion sur la réforme des collectivités territoriales. Pour l’occasion, l’Association des Maires de France avait invité Dominique Brachet, la directrice spécialiste de l’intercommunalité au sein de l’AMF.

  René Olive, qui accueillait la réunion sur la commune de Thuir, a prononcé un discours introductif musclé et sans concession qui a rassuré plus d’un maire de la Communauté de Communes des Aspres. Il y a insisté sur l’histoire et les atouts de notre communauté, sur son sens de la mutualisation et de la solidarité, et sur ses compétences sociales, loin, bien loin d’une Communauté d’Agglo expansionniste, plus préoccupée de dévorer des territoires que de se concentrer sur ses missions. Il a par ailleurs dénoncé les pouvoirs exorbitants du Préfet et ses prises de position mettant en péril notre communauté de communes puisque, en acceptant l’entrée de Llupia et Ponteilla dans l’Agglo, il a fragilisé le socle même de notre fonctionnement. Il a également salué le courage de Jean Vila, maire de Cabestany, dans son action de résistance à l’Agglo et enfin, il a réaffirmé la volonté d’indépendance de notre communauté de communes. Le René Olive des grands jours donc!

  Après l’intervention de Guy Ilary, président de l’AMF 66, Mme Brachet a décrypté une réforme parfois peu aisée à comprendre pour qui n’est pas juriste, fort difficile à appréhender par les élus et donc également pour le commun des électeurs. Si elle est adoptée, cette réforme va pourtant profondément bouleverser la démocratie locale.

  Le projet de loi de réforme des collectivités territoriales, proposé par la commission Balladur, a déjà été étudié deux fois au Parlement. L’Assemblée nationale et le Sénat n’ayant pas réussi à se mettre d’accord sur un texte commun, une commission mixte paritaire - comprenant sept députés et sept sénateurs, reflétant politiquement les deux assemblées – doit se réunir le 13 octobre prochain. Si cette commission mixte parvient à se mettre d’accord sur un texte commun, celui-ci sera voté dans les mêmes termes par les deux assemblées, seul le gouvernement pouvant alors introduire des amendements. En cas de désaccord le 13 octobre, le texte sera de nouveau réétudié au Parlement, les députés ayant, cette fois, le dernier mot. Le long périple de cette réforme initiée par le gouvernement est symbolique de ses enjeux, tant pour les intercommunalités que pour les conseils généraux et régionaux.

  Depuis deux ans, l’Association des maires de France bataille pour faire entendre la voix des élus locaux auprès des parlementaires. Seuls deux des 70 amendements qu’elle a proposés n’ont pas été retenus, mais non des moindres puisqu’il s’agit de la création des communes nouvelles (une commune pourraient absorber des communes plus petites contre leur gré), et de la fin des financements croisés (les plus gros projets des communes et des intercommunalités bénéficient généralement de plusieurs types de subventionnements mêlés – Département, Région, Etat, Europe, etc).

  Les objectifs de ce futur schéma sont la suppression des discontinuités et des enclaves, la constitution de communautés d’au moins 5000 habitants pour une meilleure cohérence territoriale, la réduction du nombre de syndicats. Deux points fondamentaux de cette  réforme  se cristallisent autour de l’élection des représentants communautaires et d’une soi-disant « rationalisation » de la carte intercommunale.

  Concernant le premier point, la loi, qui devrait être votée avant la fin de l’année, s’appliquera lors des prochaines échéances municipales, en 2014. Les élus communautaires le seront alors au suffrage universel direct pour toutes les communes dont le conseil municipal est élu au scrutin de liste (soit celles de plus de 3500 habitants). En fait, les élus communautaires putatifs seront fléchés sur les listes, on ne pourra pas les choisir. La loi fixera aussi, selon un tableau et un calcul valables sur tout le territoire français, le nombre de sièges au sein du conseil d’agglo ou de la communauté de communes et limitera le nombre de vice-présidences (20% de l’organe délibérant dans la limite de 15 vice-présidences). La communauté d’agglo Perpignan-Méditerranée, par exemple, qui compte actuellement 116 élus et 32 vice-présidents et prévoit de passer à 140 membres et 42 vice-présidences après la fusion du Rivesaltais-Agly et l’absorption programmée de Cabestany, devra, à partir de 2014, se contenter de 103 ou 104 élus et de 15 vice-présidents.

  Deuxième aspect de la réforme, et pas le moindre en termes d’aménagement du territoire et d’influence politique, l’achèvement et la rationalisation de la carte intercommunale. À compter du 30 juin 2013, plus une seule commune ne pourra créer une enclave ou une discontinuité territoriale dans une intercommunalité. Un schéma départemental de l’intercommunalité devra être arrêté par le préfet au plus tard le 31 décembre 2011. Plus grave encore, d’ici le 30 juin 2013, le Préfet disposera d’un pouvoir exceptionnel qui lui permettra de transformer la carte des intercommunalités sans même devoir solliciter l’avis des communes! C’est donc la période de tous les dangers que nous allons traverser de 2011 à 2013. Espérons que le Préfet n’abusera pas de son pouvoir pour nous obliger à fusionner avec l’Agglo…

Maya Lesné, maire de Tordères