Sept mois après sa première demande d’entretien (faisant suite au dépôt de la demande de moratoire en Préfecture), le Préfet a accepté de recevoir le Collectif PPRif P.-O., sous l’impulsion de notre Président de Région, Christian Bourquin, qui s’est pleinement investi dans cette cause dès qu’il en a été alerté. 

  A cette réunion, le Préfet avait bien entendu convié Christian Bourquin, mais également Jean-Paul Alduy, sénateur, et Guy Ilary, Président de l’Association des Maires des Pyrénées-Orientales, ainsi que les élus de 58 communes concernées (dont Tordères). Il y a été débattu des problèmes liés aux modalités d’application des PPRif sur notre département, et de l’inégalité de traitement des zones rouges sur le territoire national (c’est-à-dire l’inégalité de traitement des citoyens devant la Loi). 

  Maya Lesné, maire de Tordères et porte-parole du collectif, a présenté un argumentaire mis au point pendant plusieurs semaines avec Christian Bourquin. 

  En préalable, elle a réaffirmé que les maires membres du Collectif PPRif P.-O. étaient tous favorables à la mise en œuvre de moyens de prévention du risque incendie de forêt visant à limiter les conséquences des feux de forêt sur la sécurité des personnes et à assurer la protection des habitations, mais qu’ils estimaient que l’élaboration d’un PPRif devait reposer sur une démarche de dialogue et d’échanges. Elle a pris l’exemple de la concertation mise en œuvre pendant l’élaboration du PPRif du Massif d’Uchaux (1) où les élus ont participé à de nombreuses réunions, tout comme les administrés qui ont pu assister à deux réunions publiques et à trois séances de réception du public avec échanges individualisés, avec une exposition sur le risque incendie et les feux de forêt du massif, sur l’outil de prévention PPRif, sa méthode d’élaboration, ses principes et la procédure réglementaire dont il s’accompagne, et la mise à disposition du public d’un registre d’observations. 

  Elle a souligné l’importance du dialogue et de la concertation avec les élus de terrain, ainsi que la nécessité d’une analyse par massif. Elle a insisté sur le fait que les maires concernés souhaitaient un partenariat dans l’instruction des PPRif avec les services de l’Etat, et demandaient une concertation globale de tous les intéressés (Etat, élus de terrain, syndicats intercommunaux – comme le SIP ou le SIVU du Tech, etc.) à l’échelle certes de chaque commune, mais au préalable sur l’intégralité du bassin de risques ou massif concerné (Aspres, Albères, Fenouillèdes, Vallespir). L’élaboration des PPRif doit reposer sur le dialogue, la concertation, la transparence et une mise en commun des informations pour une gestion plus rationnelle et moins arbitraire du risque naturel prenant en compte l’avenir socio-économique des massifs. Elle a donné l’exemple de départements étudiant leur PPRif par massifs ou bassins, comme l’Aude qui prescrit ses PPRif par secteurs (communes du massif de la Pinède de Lézignan-Corbières, communes du massif de la Cavayère, communes du Littoral Sud, communes de la Clape Nord, communes de Narbonne-ouest, communes de Fontfroide-est), l’Hérault par bassins de risques (trois en tout), le Var par massifs (Sud Sainte-Baume, Massif des Maures, Massif de l’Estérel), tout comme le Vaucluse (massif d’Uchaux) . 

  Elle a abordé les thèmes de la prévention et de la protection des massifs. Les communes demandent que soient corrigées les cartes d’aléas, souvent obsolètes, et donc les cartes de zonage, et que soient prises en compte les mesures de protection contre l’incendie appliquées dans les zones de forêt et de maquis (elles ont déjà réalisé d’importants efforts dans leur mise en œuvre, tels que les plans de protection D.F.C.I. : entretien des pare-feu, réalisations de points d’eau, citernes, etc.). Les communes demandent aussi que soit pris en compte le problème de la rareté de l’eau, fondamental dans nos massifs. Elle a donné l’exemple de sa commune où, sur la carte d’aléas, la Forêt Domaniale du Réart, qui est sans aucun doute une des plus dangereuses du département, est classée en risque modéré. 

  Elle a également souhaité qu’on réfléchisse à l’habitat en zone rouge et à l’inégalité de traitement de cette zone sur le territoire national. Il est nécessaire qu’une approche plus réaliste de l’habitat en zone rouge soit prise en compte et notamment que soient abordées l’interdiction de reconstruction en cas d’incendie et l’inégalité de traitement des zones rouges selon les départements. Il semble urgent de réfléchir à une définition objective de la zone rouge, valable pour tout le territoire national afin d’assurer une égalité de traitement pour chaque citoyen. Maya Lesné a alors donné l’exemple de plus d’une cinquantaine de communes où la reconstruction d’un bâtiment détruit par un incendie en zone rouge est autorisée : 

- les 17 communes concernées par un PPRif dans l’Hérault (2) autorisent la reconstruction d’un bâtiment existant détruit sous certaines conditions (prescriptions relatives à la desserte par un réseau d’hydrants normalisé ainsi qu’à l’accessibilité depuis une voie ouverte à la circulation publique). 

- la commune d’Auribeau-sur-Siagne (Alpes-Maritimes) où sont autorisées les réparations effectuées sur un bâtiment sinistré à condition de ne pas aggraver les risques et de ne pas augmenter le nombre de personnes exposées. 

- Ou bien encore, dans le même département, Cagnes-sur-Mer, Grasse, Roquefort-les-Pins, La Roquette-sur-Siagne, Vence où si, en zone rouge, une maison a été détruite par un incendie de forêt, le projet de reconstruction doit être soumis à l’examen d’une sous-commission départementale créée auprès de la Commission Consultative Départementale de Sécurité et d’Accessibilité des Alpes-Maritimes.

- le Var (3) où, en zone rouge, la réparation ou la reconstruction de bâtiments implantés antérieurement à l’approbation du PPRif, et régulièrement autorisés, qui seraient endommagés ou détruits par un sinistre (y compris par un feu de forêt) est admise sous réserve de réduire la vulnérabilité des bâtiments par la mise en conformité avec les dispositions constructives générales et avec les dispositions relatives aux voiries et les dispositions relatives à la défense incendie. Le maire pourra disposer d’un avis de la Commission Consultative Départementale pour la Sécurité et l’Accessibilité (CCDSA).

- le Vaucluse sur le massif d’Uchaux (4) où, en zone rouge, est admise la reconstruction à l’identique d’un bâtiment existant détruit par un incendie de forêt, sur la même parcelle, sans augmentation de la vulnérabilité, dans le respect des règles applicables, si la défendabilité de la reconstruction est assurée par des équipements conformes (accessibilité et défense contre l’incendie). 

- et enfin, la Haute-Corse, à Bastia où sont admis la reconstruction à l’identique, l’aménagement ou l’extension des constructions existantes (sous réserve de la mise en œuvre d’un débroussaillement suffisant, de la construction de points d’eau supplémentaires équipés d’une motopompe proposant un débit suffisant et de l’utilisation de matériaux spécifiques, résistants au feu). 

  Elle a abordé la question de l’activité agro-environnementale et touristique : la présence ou le retour d’agriculteurs sur les territoires à risque incendie paraît être un moyen efficace de prévention. En complément d’activités agricoles souvent peu rémunératrices, les paysans devraient avoir la possibilité d’implanter une activité touristique responsable et bien maîtrisée (gîtes ruraux, chambres et tables d’hôte, parcours piétonniers balisés, etc.). Elle a pris l’exemple des PPRif des communes du Tignet, du Rouret et de Valbonne (Alpes Maritimes) autorisent les constructions à usage d’habitation et leur extension limitée (30 % de la SHON existante sans excéder 200 m² de SHON totale) liés et nécessaires au fonctionnement d’une exploitation agricole pérenne sur la zone considérée sous certaines conditions prescrites par une sous-commission relative à la sécurité contre les risques d’incendie de forêt, lande, maquis et garrigue. 

  Elle est revenue sur les modalités d’application. Lorsque les PPRif sont adoptés, leur mise en application entraîne des conséquences financières lourdes et toujours peu aisées à expliquer aux populations. Les maires souhaitent être épaulés et conseillés par les services de l’Etat lors de cette mise en application et lors du contrôle sur le terrain. Elle a remis en avant l’exemple du Massif d’Uchaux où sont prévues des visites régulières de l’Etat pour observer l’évolution sur le terrain et des bilans autour des problèmes rencontrés. 

  Elle a souligné que les contraintes imposées par l’Etat, sans engagement financier précis de sa part, étaient disproportionnées par rapport aux capacités pécuniaires des communes concernées. 

  Après une longue et houleuse discussion entre le Préfet (et ses services) et les maires du département, tempérée par Christian Bourquin, plusieurs points d’accords ont été trouvés : 

- le principe de la concertation préalable par massif qui se fera très rapidement a été accepté (le PPRif communal demeurant le document final) ; 

- les PPRif en cours d’élaboration ou approuvés (parfois imposés) seront intégrés dans l’approche par massif et seront donc susceptibles d’évolutions lorsque les maires le souhaiteront ; 

- le délai de mise en œuvre de cette concertation sera d’un an à un an et demi ; 

- les financements, actuellement lourds pour les communes, seront assumés conjointement par l’Etat, la Région, le Département et, éventuellement, les syndicats dédiés à la DFCI, la participation des communes devant rester raisonnable et en adéquation avec leur budget ; 

- d’autres points feront l’objet de concertation et notamment la possibilité de reconstruction après sinistre et le maintien de l’agriculture. 

  Le Préfet a également convenu que : 

- les cartes de zonage et d’aléas pouvaient parfois être mal légendées ou obsolètes, 

- les PPRif pouvaient évoluer et être revus si les travaux préconisés étaient bien effectués, 

- la gestion du risque par des structures supra-communales (syndicats, communautés de communes, etc.) lui paraissait adaptée et que l’Etat financerait par tous les moyens disponibles ce type d’approche, 

- le problème de l’approvisionnement en eau était un point sensible à maîtriser et sur lequel il fallait rechercher de nouvelles solutions. 

  Pour en terminer, il a rappelé que les propriétaires privés devaient être mis à contribution et que s’ils ne respectaient pas les règles édictées, il aiderait les élus à faire respecter la loi. 

  L’ensemble de cette nouvelle approche est basée sur une concertation renforcée de toutes les parties prenantes qui devraient permettre d’améliorer la prévention des risques liés aux incendies de forêt sur nos massifs.  


(1) : A cheval sur deux départements (le Vaucluse et la Drôme) et deux régions (PACA et Rhône-Alpes) : communes de Bollène, Lagarde-Paréol, Mondragon, Mornas, Piolenc, Sérignan du Comtat, Uchaux et Rochegude.

(2) : Assas, Clapiers, Montferrier-sur-Lèz, Prades-le-Lèz, Saint-Mathieu-de-Tréviers, Saint-Vincent-de-Barbeyrargues, Le Triadou, Combaillaux, Grabels, Matelles, Saint-Clément de Rivière, Saint-Gély-du-Fesc, Juvignac, Montpellier, Murviel-lès-Montpellier, Pignan, Saint-Georges d’Orques.

(3) : 17 communes concernées dans le bassin à risque « Sud Sainte-Baume » (Le Beausset, La Cadière d’Azur, Le Castellet, Evenos, Signes), sur le Massif des Maures (Bormes-les-Mimosas, Collobrières, La Garde Freinet, La Londe Les Maures, Plan La Tour, Roquebrune sur Argens, Sainte-Maxime, Vidauban) et sur le Massif de l’Estérel (Les Adrets de l’Estérel, Fréjus, Saint-Raphaël, Tanneron).

(4) : Voir note 1.