Chers concitoyennes et concitoyens,

  Dans son 54ème engagement, le candidat à la présidence de la République François Hollande, affirmait : «J’engagerai une nouvelle étape de la décentralisation en associant les élus locaux. Je ferai voter une loi sur le renforcement de la démocratie et des libertés locales. Elle prévoira notamment l’abrogation du conseiller territorial et la clarification des compétences. Un pacte de confiance et de solidarité sera conclu entre l’État et les collectivités locales garantissant le niveau des dotations à leur niveau actuel. Je réformerai la fiscalité locale en donnant plus d’autonomie aux communes, aux départements et aux Régions, en contrepartie d’une plus grande responsabilité. Une véritable péréquation sera mise en œuvre.» Oui, mais comme dirait l’autre, « ça, c’était avant »! Le gouvernement, dans la lignée de ses prédécesseurs a présenté au Parlement un projet de loi «portant nouvelle organisation territoriale de la République» qui transfère loin de notre commune de nombreuses décisions qui nous concernent.

  La première étape a été validée par l’Assemblée Nationale, le 24 juillet, avec l’adoption de la loi sur la délimitation des régions et la modification du calendrier électoral. La France est donc passée de 22 à 13 régions mais qu’on se rassure, grâce à un discret amendement survenu le 18 juillet, les nouvelles régions disposeront d’un nombre de conseillers équivalent à la somme des élus des anciennes régions ! Les économies escomptées ne seront donc pas au rendez-vous, d’autant que les indemnités des élus devraient, elles aussi, augmenter. En effet, actuellement, le barème est calculé en fonction de la population de chaque région (de 1 520,59 € bruts par mois pour une  région de moins de 1 million d’habitants, jusqu’à 2 661,03 € bruts par mois pour une région de plus de 3 millions d’habitants), et dans plusieurs cas, les nouvelles régions fusionnées rassemblent plus de trois millions d’habitants (c’est le cas notamment de la région Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon). L’augmentation des indemnités, sur un mandat de six ans, est estimée à 34 millions d’euros pour l’ensemble des élus concernés… De quoi limiter les économies envisagées par le gouvernement dans le cadre de cette réforme emblématique.

  Mais le plus grave est à venir puisque devraient être adoptées dans la foulée, de nouvelles lois relatives aux compétences des régions, des départements et des intercommunalités, ouvrant la perspective d’une suppression des conseils généraux à l’horizon 2020.

  En qualité d’élus d’une commune rurale, nous nous devons de vous informer des conséquences d’un tel texte. Si une modification de notre organisation territoriale est sans doute nécessaire, elle ne doit pas s’en prendre prioritairement au monde rural, déjà largement pénalisé. Elle doit respecter notre Constitution et les trois niveaux de collectivités que sont les communes, les départements et les régions. Les élus ruraux soutiennent le principe d’une démocratie de proximité autour de la cellule de base de la République et dénoncent solennellement la campagne mensongère menée au plus haut niveau pour faire croire à nos concitoyens qu’ils gagneraient à perdre leurs services publics locaux. Car l’objectif de la réforme vise bien à anéantir le niveau de proximité et concentrer pouvoirs et moyens loin de là où vivent nos concitoyens en donnant la priorité aux projets les plus importants liés aux métropoles. Elle amplifie l’opposition entre villes et campagne et ne répond pas à l’enjeu d’un effort significatif en matière d’équité.

  Ces lois affaibliront considérablement le rôle du maire et des élus du conseil municipal en asséchant les ressources communales et en transférant ailleurs des compétences, sans l’accord des élus, représentants du peuple. Si nous sommes favorables au renforcement de l’intercommunalité, c’est à la condition que les élus de nos villages y soient associés et approuvent ces changements.

  Enfin, à terme, il est prévu de supprimer les services du Conseil Général alors que le département est aujourd’hui l’interlocuteur le plus direct des communes rurales grâce à son rôle en matière de soutien aux services publics de proximité. Rien dans ce qui est écrit, rien dans l’état des finances locales ne permet de penser que ces services pourraient être rendus par d’autres collectivités ou notre intercommunalité. Si le département était supprimé, les conséquences seraient immédiates et dramatiques sur l’aide sociale, les subventions au monde associatif, sur les investissements des routes, les collèges, etc. Cela reviendrait à transférer les compétences du Département à la Région, lointaine, où siègent du fait du mode de scrutin, des élus et une administration « hors sol ».

  La démarche du conseil municipal de Tordères n’est pas isolée. Elle est associée solidairement à la démarche d’élus de toute la France, notamment des élus de l’Association des Maires Ruraux de France. Aussi, nous appelons tous les habitants, les associations, les représentants du monde économique, social, de la santé de notre commune à s’informer et à rejoindre les élus ruraux dans leur combat. Soutenir la commune, c’est soutenir la République !

Maya Lesné, maire de Tordères, Dominique Maurice, 1ère adjointe, et Gilbert Fantin, 2nd adjoints