Compte-rendu de la commission extramunicipale des affaires sociales du 15 juin 2016
Créé par torderes le 24 juin 2016 à 21:41 | Dans : A retenir, Affaires sociales, Environnement, Equipe municipale et commissions, Santé
Etaient présents : J. BLIN, J.-P. COMBETTES, J.-M. DELPUECH, V. GOLLER, M. LESNÉ, M.-J. MATHIS, D. MAURICE, B. MOLINA, J.-M. MOLINA, C. MOTTA, M. NATUS, M.-F. De SAINT-ANDRÉ, P. De SAINT-ANDRÉ.
Absents (excusés) : G. FANTIN, M.-H. TIPY.
Avant d’entrer dans le débat, Mme le maire fait une brève présentation du compteur « Linky », de ses origines, de son fonctionnement, de ses avantages supposés et de la controverse dont il est l’objet. Comme tous les autres maires de la Communauté de Communes des Aspres, elle a été invitée, il y a quelques semaines, à une réunion animée par des représentants de l’ERDF (chargés des collectivités territoriales) pour débattre de ce sujet.
Les nouveaux compteurs « Linky », posés par ERDF à travers toute la France, devraient être déployés à Tordères à partir de 2018. La réflexion et la concertation sont donc lancées dès l’été 2016 pour étudier le problème bien en amont et être sûrs de ne pas prendre de décisions trop hâtives.
Qu’est-ce que le compteur Linky ? Il s’agit d’un compteur communicant développé en France par ERDF depuis 2009 (année des premières expérimentations à Lyon, Grenoble, Lorient, etc.). Il est déjà implanté dans d’autres pays d’Europe et sur d’autres continents.
Son principe de base est de pouvoir être interrogé et actionné à distance, contrairement au compteur classique. Il est conçu en réponse aux directives européennes sur « la transition énergétique pour la croissance verte » (loi du 17 août 2015) qui préconisent la généralisation de compteurs de ce type, pour « promouvoir la responsabilisation citoyenne et une meilleure gestion des dépenses énergétiques ».
La Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a donné son feu vert, dès 2011, pour qu’il soit déployé, après expérimentation et avis favorable de l’Etat. 35 millions de compteurs devraient donc être installés sur l’ensemble de la France entre 2015 et 2021, pour un coût d’environ 5 milliards d’euros dont l’ERDF affirme qu’ils ne seront pas répercutés sur l’utilisateur et que, étalés sur vingt ans, ils seront économiquement neutres (ils seraient apparemment largement compensés par la fin de la fraude qui représenterait plusieurs milliards d’euros par an).
Pour pouvoir répondre à distance, cet appareil dernière génération utilise le Courant Porteur en Ligne (CPL) du réseau d’électricité domestique, c’est-à-dire le réseau basse tension. Dans la seconde partie de la transmission, les informations sont récupérées par le biais d’un concentrateur (installé dans un poste de transformation), puis par un réseau de téléphonie mobile, elles parviennent au système central qui récupère l’ensemble des données. A terme, si 35 millions de compteurs sont installés, il devrait y avoir environ 700 000 concentrateurs répartis en France pour récupérer les données.
Lors de la rencontre entre les élus de la Communauté de Communes des Aspres et les représentants d’ERDF, ceux-ci ont largement repris les arguments du Ministère de l’Environnement pour vanter les avantages d’un tel compteur qui :
- relèverait automatiquement les consommations et ne nécessiterait plus l’intervention physique d’un technicien ni la présence de l’utilisateur ;
- permettrait un relevé plus fréquent et donc des facturations sur la base de données réelles et non plus estimées (ce qui évite les rattrapages de facture ou les trop payés) ;
- simplifierait certaines opérations, sans dérangement ni rendez-vous, et dans des délais réduits (changements de puissance, de fournisseur) ;
- permettrait à l’usager de mieux connaître sa consommation et donc de bénéficier d’une offre tarifaire mieux adaptée ;
- faciliterait le développement de services de pilotage de la consommation (équipements électroménagers, ballon d’eau chaude, borne de recharge de véhicule électrique, etc.) ;
- permettrait de mesurer les volumes d’électricité produits par les installations de production d’électricité des particuliers (panneaux photovoltaïques par exemple) ;
- éviterait par la même occasion les fraudes.
Beaucoup d’associations, de particuliers et d’élus remettent largement en cause ces avantages et avancées supposés. C’est le cas, notamment, de la CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) qui a été la première à dénoncer les dérives possibles liées aux compteurs « Linky », en s’inquiétant du non respect de la vie privée des utilisateurs et de la possibilité de piratage qu’induirait ce système (les données permettraient de déduire des informations à valeur commerciale). L’inquiétude de la CNIL a été relayée par la Ligue des Droits de l’Homme qui a réclamé un moratoire sur l’installation des compteurs « Linky » mais ne l’a pas obtenu.
Sont ensuite entrées dans la controverse une multitude de petites associations qui se sont inquiétées des ondes électromagnétiques émises par le compteur « Linky » et auxquelles le Ministère de l’Ecologie répond que « le niveau d’ondes électromagnétiques générées par « Linky » est conforme à la réglementation en vigueur et qu’il n’y a donc pas de risque sanitaire attaché à l’utilisation de ce compteur ».
Le CRIIREM (Centre de Recherche et d’Information Indépendantes sur les Rayonnements Electromagnétiques) a réalisé une étude sur l’exposition aux ondes dans les zones d’expérimentation du « Linky » et ne s’inquiète pas tant des compteurs que des concentrateurs et de leurs antennes relais, émettant des hyperfréquences avec des valeurs d’exposition aux champs d’induction magnétique qui pourraient dépasser les normes d’usage [1].
Une poignée d’élus de la Communauté de Communes des Aspres, alertés par ces associations, ont relayé les interrogations des personnes hypersensibles aux ondes (comme le Priartem-Electrosensibles) et ont donc demandé à l’ERDF s’il était vrai que le compteur « Linky » enverrait en permanence des informations par Courant Porteur en Ligne et émettrait un rayonnement dans toute la maison. Il leur a été répondu que l’envoi d’informations ne se faisait que quelques secondes et une seule fois par jour, ce qui reste très contesté.
En termes de prix, l’ « UFC Que Choisir ? » souligne que la généralisation des compteurs Linky devrait entraîner 10 millions de foyers à souscrire à une puissance d’abonnement plus élevée car ce nouveau compteur, contrairement aux compteurs classiques, ne supporterait aucun dépassement de la puissance souscrite et se couperait instantanément, ce que réfute ERDF qui affirme qu’après expérimentation, le compteur communicant n’est pas plus sensible aux dépassements de puissance qu’un compteur classique.
Toujours selon l’ « UFC Que Choisir ? », ce surcoût d’abonnement représenterait globalement 308 millions d’euros pour les utilisateurs et pourrait rapporter gros à ERDF, ce qu’ERDF réfute complètement.
Interpellés sur les questions de non respect des libertés et de risque sanitaire, des élus municipaux se sont également interrogés, à travers toute la France, sur la question de la propriété des compteurs électriques. Ils sembleraient qu’ils soient propriétés des communes, au même titre que les ouvrages et les réseaux de distribution, et la Direction Générale des Collectivités Locales souligne que, même s’ils sont propriétés des Autorités Organisatrices de Distribution (le SYDEEL dans le cas de la plupart des communes des Pyrénées-Orientales dont Tordères), seul le concessionnaire aurait le droit de les développer et de les exploiter [2].
Une récente note de la Fédération Nationale des Collectivités Concédantes et Régies (FNCCR) , écrite après étude juridique, affirme que le déploiement des compteurs est une obligation légale et estime qu’il serait « inadéquat pour le maire de se prévaloir de son pouvoir de police générale » pour refuser l’installation des compteurs communicants sur le territoire de sa commune.
Dès ce mois d’avril 2016, une commune (Varennes-sur-Seine), la première sans doute d’une longue série, a donc été mise au Tribunal Administratif par l’ERDF qui conteste sa délibération refusant le déploiement des compteurs « Linky » sur le territoire de la commune. Dans l’éventualité où le conseil municipal de Tordères prendrait une délibération contre le déploiement des compteurs « Linky », il faudra donc veiller à la formulation de cette délibération, en se faisant aider par un cabinet juridique.
Il existe bien d’autres questions en suspens comme celle des suppressions d’emplois générés par la mise en place de ce compteur, etc.
On le voit bien, entre les pro et les anti-Linky, c’est argument contre argument et il est difficile de démêler le vrai du faux et de savoir qui a tort et qui a raison, mais dans le doute, la commission réunie ce jour préconise de s’abstenir et de privilégier le « principe de précaution » en attendant d’avoir de plus amples retours d’expérience.
Les membres de la commission souhaitent que le conseil municipal prenne une délibération et qu’elle soit la plus ouverte possible afin de laisser la plus grande marge de manœuvre aux uns et aux autres selon leur volonté. Si d’aucuns ne souhaitent pas qu’on leur impose le compteur « Linky », il faut qu’ils se sentent soutenus dans leur démarche par la commune, et si d’autres souhaitent pour telle ou telle raison être équipés d’un compteur « Linky », il faut qu’ils aient la possibilité d’y avoir recours aussi. La délibération devra donc être très finement écrite.
Une première ébauche de délibération a été réfléchie et débattue par la commission et sera présentée au conseil municipal qui, s’il accepte que cette question soit portée à l’ordre du jour, devrait se prononcer sur le sujet avant la fin de l’année 2016.
[1] : Pour information, le CRIIREM, association écologiste indépendante, dénonce aussi régulièrement le manque d’exigence des normes internationales (et notamment de l’OMS) d’exposition aux champs magnétiques en matière de téléphonie, il s’inquiète beaucoup des ondes produites par la Wifi, et déconseille d’utiliser les lampes fluorescentes à basse consommation. On peut dire que le CRIIREM est donc plutôt vigilant en matière de risques électromagnétiques.
[2] : Il semblerait que du fait que les communes aient conclu un contrat de droit de cession avec l’ERDF, elles ne puissent pas refuser le déploiement du compteur « Linky ».
Une réponse to “Compte-rendu de la commission extramunicipale des affaires sociales du 15 juin 2016”
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A la lecture du cahier des charges de concession du Sydeel 66, on voit bien que l’usager a du mouron à se faire